Des églises où les pasteurs manipulent des serpents immortalisées par Cyril Abad

Des églises où les pasteurs manipulent des serpents immortalisées par Cyril Abad

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© Cyril Abad/Inland Stories

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Par Lise Lanot

Publié le

Le photographe signe une série poignante, auprès de communautés de croyants isolés au sein des snake churches.

Cyril Abad a grandi “dans un environnement familial catholique non pratiquant”. Pas franchement touché par la foi, il raconte s’être émancipé de cette tradition tout en conservant cependant sa curiosité pour “la question religieuse”.

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C’est cet intérêt, et la lecture de In God’s Country de Douglas Kennedy (une “véritable immersion railleuse dans le monde du fondamentalisme chrétien le long de la Bible Belt dans le sud des États-Unis”), qui l’a convaincu, en 2016, de partir explorer, outre-Atlantique, des églises aux traditions particulières.

En Virginie occidentale, il a découvert les “snake churches” (également présentes dans d’autres États comme le Kentucky, le Tennessee ou l’Alabama), des églises pentecôtistes qui invitent à leur messe d’étonnants invités. Couverts d’écailles, dénués de membres et omniprésents dans la Bible, ce sont bien des serpents qui font partie intégrante des services religieux.

Cet attrait pour les reptiles puise son origine dans un verset de l’Évangile selon Marc (16:17) : “Voici les miracles qui accompagneront ceux qui auront cru : en mon nom, ils chasseront les démons ; ils parleront de nouvelles langues ; ils saisiront des serpents ; s’ils boivent quelque breuvage mortel, il ne leur fera point de mal ; ils imposeront les mains aux malades, et les malades, seront guéris.”

C’est pour prouver leur foi et leur “pouvoir sur les démons” que les pasteurs de ces églises rurales manipulent des serpents pendant leurs prêches, lorsqu’ils se sentent investis par le Saint-Esprit. Ces croyances et ce “pouvoir” se transmettent souvent de génération en génération, dans des familles qui vivent dans un entre-soi tant leurs régions sont désertées.

Ces croyances survivent aux drames. Ainsi, Chris, un charpentier devenu pasteur que Cyril Abad a suivi, continue de “danser” avec des serpents venimeux malgré les décès de son père et son frère, survenus à cause d’une morsure de serpent lors d’une messe.

“Les pasteurs refusent en effet d’être soignés, ce qui serait une trahison à leur foi”, précise le photographe. “Aux États-Unis, plus de soixante cas de décès dus à des morsures de serpents lors de services religieux ont été enregistrés.” Interdites dans plusieurs États, les manipulations de serpent se poursuivent pourtant, souvent en secret. 

Les images de The Snake Church sont visibles dans une exposition soutenue par l’UPP, jusqu’au 5 janvier 2022, ainsi que dans le livre In God We Trust, publié aux éditions Revelatœr. Cyril Abad fait partie du collectif de photographes Inland Stories. Vous pouvez retrouver son travail sur son site et sur son compte Instagram.