Sous les néons, l’amour dans les clubs photographié par Karel Chladek

Sous les néons, l’amour dans les clubs photographié par Karel Chladek

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© Karel Chladek

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Par Donnia Ghezlane-Lala

Publié le

Les clubs sont fermés mais ces photos ont de quoi nous réconforter.

À 29 ans, Karel Chladek en a foulé, des clubs. Sous les néons chatoyants, il photographie les amours fugaces, des couples qui se lient et se délient, des moments de liesse suspendus dans les ondes. Chaque image semble raconte son histoire, sa passion, mêlée aux battements par minute. 

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À l’heure où le monde de la nuit s’effondre, ses photos opèrent comme des reliques d’un autre temps. Elles sont une ode à l’amour, à la promiscuité, à la fête, à la jeunesse et à l’atmosphère tamisée – hautement cinématographique – des clubs. Le photographe montréalais a accepté de nous parler de son livre Public Intimacy, d’un temps qui nous semble loin, loin, loin, et qui nous manque. Rencontre.

“Public Intimacy”. (© Karel Chladek)

Konbini arts | Hello Karel ! Raconte-nous comment tu as commencé la photographie.

Karel Chladek | J’ai découvert la photographie à l’âge de 17 ans, quand mon père m’a offert un appareil photo (Canon 10D) pour mon anniversaire. À cette époque, j’avais déjà une fascination pour l’art, mais je n’avais jamais considéré la photographie comme but ultime. J’ai toujours aimé la musique électronique et la course automobile, et ces univers ont assurément façonné mon univers. La photographie est donc le médium caché à travers lequel j’ai pu m’exprimer tout en vivant mes multiples passions.

Comment as-tu eu l’idée de la série Public Intimacy ? Explique-nous un peu de quoi il s’agit et quelle était ton intention.

Public Intimacy m’est apparue comme une évidence, une intuition acquise en analysant mon travail dans les boîtes de nuit. À force d’observer les romances, les impulsions, la perte de candeur, les unions qui se formaient, j’ai fini par réaliser qu’un thème sortait du lot. Je mets en valeur l’idée d’intimité en public, en la raffinant, sans tomber dans le chaos de la nuit, voire la débauche.

Comment abordes-tu les gens que tu photographies ? Quelle est leur réaction ?

C’est un sujet délicat, car l’essentiel de mon travail se passe sur le vif, donc la plupart des personnes ne sont pas informées. C’est pourquoi il m’est primordial d’allier mon approche à une pudeur et une délicatesse envers les sujets que je photographie. Ainsi, je tente toujours de photographier les gens sous leur meilleur jour et de créer des souvenirs mémorables et inspirants pour eux. Il règne une sorte de collaboration intuitive entre ces personnes et moi que je tiens à honorer. Dans la plupart des cas, ceux qui se retrouvent dans mes clichés sont satisfaits du résultat.

“Public Intimacy”. (© Karel Chladek)

Chaque scène que tu immortalises invite à l’imagination, parle d’amour, de jeunesse, et porte une histoire. Pourrais-tu t’arrêter sur une image et nous raconter ses coulisses ?

Cette photo [ci-dessus] a été prise lors d’une soirée à la thématique “disco” où la piste de dance transpirait la jeunesse, l’amitié et l’amour, justement. J’observais le groupe d’amies depuis plusieurs minutes déjà, lorsqu’une étreinte soudaine se produit, au milieu des danseurs. Ce genre d’images me plaît particulièrement, car elle provoque une curiosité chez le spectateur, à savoir les raisons de cet aveu d’affection muet ou même la nature de leur relation… Bref, une infinité d’histoires possibles à se raconter !

“Les boîtes de nuit, si on les observe d’un point de vue de spectateur et non participatif, peuvent nous sembler comme un film.”

Ton travail est très cinématographique, est-ce que tu peux nous en dire plus sur tes inspirations ?

Mon travail a toujours été très intuitif, très naturel. L’esthétique cinématographique de mes photos est le fruit de cette intuition mêlée aux lumières bienveillantes et aux personnes qui fréquentent les clubs. Les boîtes de nuit, si on les observe d’un point de vue de spectateur et non participatif, peuvent nous sembler comme un film. Et moi, chaque soir, je suis un spectateur : j’observe.

“Public Intimacy”. (© Karel Chladek)

Comment gères-tu ta lumière dans un club ? Et comment arrives-tu à composer avec la foule, l’urgence ?

Avec les années, on apprend à bien utiliser son appareil photo pour l’adapter aux inconvénients de la nuit. Comme un peu pour tout dans la vie, tout vient avec de la pratique. Étonnamment, je me sens calme dans une foule et les clubs ont fini par devenir familiers, un peu comme un deuxième chez moi. Les nuits se suivent et ne se ressemblent pas, je reste donc aux aguets des moments de proximité ou d’individus qui captent ma curiosité, soit par leur allure soit par la manière qu’ils ont de circuler dans l’espace. Et parfois, le hasard fait bien les choses.

“Si la pandémie a fermé les clubs, elle n’aura pas volé la nuit.”

Les bars sont fermés, les clubs et salles de concert aussi, il y a la pandémie… Comment as-tu fait pour t’adapter en tant que photographe durant cette année ? Retiens-tu des choses positives ?

Mon domaine a effectivement été durement touché par cette crise. Si la pandémie a fermé les clubs, elle n’aura pas volé la nuit ! Je me suis donc tourné vers la photographie de rue, mais nocturne. J’ai aussi pu me concentrer sur la sortie de mon premier livre de photos et sur la création de musique électronique pour mon groupe Haffenfold. Somme toute, j’en sors reconnaissant et inspiré.

© Karel Chladek

Que veux-tu transmettre au public à travers Public Intimacy ?

J’ai toujours voulu transmettre ces moments uniques, ces secrets de la nuit dont je suis témoin. Aujourd’hui, ce message prend tout son sens avec le confinement et la fermeture des clubs. Public Intimacy est un témoignage d’une sorte de liberté qui, autrefois, existait. J’aimerais que ce livre agisse comme un baume, l’espoir que ces moments d’allégresse existent toujours.

Quels sont tes projets futurs ?

Je compte toujours travailler à donner une meilleure image de la nightlife. Je m’y remettrai dès l’ouverture des boîtes de nuit. J’aimerais d’ailleurs documenter les clubs à l’international. La pandémie m’a reconnecté avec ma passion pour la musique, alors je compte créer à ce niveau-là aussi. Si vous avez des recommandations, des opportunités, écrivez-moi !

“Public Intimacy”. (© Karel Chladek)

“Public Intimacy”. (© Karel Chladek)

“Public Intimacy”. (© Karel Chladek)

“Public Intimacy”. (© Karel Chladek)

La couverture du livre “Public Intimacy” de Karel Chladek.

Vous pouvez acheter Public Intimacy de Karel Chladek ici, suivre son travail sur son site officiel et son compte Instagram. Son groupe de musique électronique s’appelle Haffenfold et vous pouvez retrouver ses presets Lightroom ici.